La pollution de l’air nous coûte très cher
La pollution, c’est beaucoup d’argent. Deux études récentes confirment que la pollution de l’air est nocive, fait augmenter les dépenses de santé et plombe la croissance économique. Vu ce qu’il en coûte – ce qu’il nous en coûte, car nous finissons toutes et tous par payer d’une façon ou d’une autre –, la réduction de la pollution atmosphérique est frappée au coin du bon sens économique et environnemental. Ce billet passe en revue les dommages causés par cette pollution et les politiques capables de la contrer.
Air global
Une importante étude révélait récemment ce que nous coûte la pollution. La réponse : vraiment très cher. Selon la Lancet Commission on Pollution and Health, une mort prématurée sur six dans le monde est attribuable à l’exposition aux produits toxiques. La pollution environnementale tue maintenant plus de gens que chacune des causes suivantes prise isolément : la violence et la guerre, le tabagisme, les maladies infectieuses, l’alcool et les accidents de la route. The Lancet estime les coûts globaux de la mortalité prématurée due à la pollution à plus de 4,6 billions (1 billion = mille milliards) de dollars US, soit 6,2 % du PIB mondial.
En l’occurrence, il s’agit surtout de pollution atmosphérique. Sur les 9 millions de morts que l’étude attribue à la pollution, 6,5 millions (72 %) sont causées par une contamination de l’air intérieur ou extérieur. Cette mortalité est en hausse à l’échelle mondiale, du fait notamment des particules fines et de l’ozone au sol, et elle se manifeste par des maladies pulmonaires et coronariennes.
C’est dans les pays à revenu intermédiaire que la pollution tue le plus. Mais elle fait tout de même près d’un million de morts dans les pays à revenu élevé comme le Canada. Et là encore, c’est la pollution de l’air qui est surtout à blâmer.
Air local
Le 3 novembre dernier, le conseil des ministres de l’Environnement du Canada a publié son rapport sur l’Air au Canada. On y compile les relevés sur l’air de partout au pays, de même que les efforts des gouvernements pour en améliorer la qualité. Dans l’ensemble, le rapport montre que les émissions de polluants atmosphériques ont diminué depuis 1990, en dépit de la croissance économique. Santé Canada estime que cette amélioration a permis d’éviter 4 100 morts et 770 000 crises d’asthme.
Les progrès accomplis ne sont toutefois pas uniformes; ils varient selon le type de polluant. Les émissions de particules fines, par exemple, ont augmenté depuis 2005 (figure 2). Et celles de composés organiques volatils ne diminuent plus depuis 2010. Ce sont là des contributeurs du smog et de certains problèmes de santé comme les crises d’asthme, la bronchite chronique et les crises cardiaques.
Au total, la facture de la pollution atmosphérique au Canada s’élevait en 2015 à 36 G$. Selon un rapport de l’International Institute for Sustainable Development, il faut ajouter à cela 7 700 morts prématurées. En somme, bien que la qualité de l’air s’améliore et que les Canadiens souffrent beaucoup moins de la pollution atmosphérique que les habitants des pays à revenu plus faible, il y a tout de même un prix important à payer.
S’attaquer à la pollution de l’air
Le Canada a donc fait des progrès. Peut-il en faire davantage?
Les politiques gouvernementales jouent ici un rôle de premier plan. Par exemple, le gouvernement fédéral a procédé le mois dernier à un resserrement des normes de 1989 sur les concentrations ambiantes de dioxyde de soufre. Le retrait graduel des centrales au charbon en Alberta est un autre exemple. Ou encore le renforcement des normes sur les émissions des véhicules.
Le progrès technologique contribue aussi à réduire la pollution atmosphérique. Témoin le récent engagement pris par douze villes importantes (dont Vancouver) de n’acquérir dorénavant que des autobus à émission zéro : c’est possible en bonne partie parce que les autobus électriques à batterie sont parvenus à maturité (en Chine, ils comptent déjà pour 20 % de la flotte). Ces innovations sont le point culminant d’années de recherche et développement, financées en partie par les gouvernements.
Et l’écofiscalité, dans tout ça? Peut-elle contribuer à la solution? La tarification du carbone fait déjà sa part de manière indirecte, en orientant les gens vers des sources d’énergie faibles en carbone, donc moins dommageables en général pour la qualité de l’air. De même, la tarification de la congestion routière pourrait diminuer les émissions du secteur des transports en réduisant les bouchons de circulation. Cet instrument n’a pas encore trouvé preneur parmi les villes canadiennes, cependant.
Plus directement, on pourrait envisager de taxer certains polluants atmosphériques comme le dioxyde de soufre. Après tout, nous en avons déjà fait l’expérience, avec le système de plafonnement et d’échange canado-américain pour les pluies acides. La Commission de l’écofiscalité pourrait se pencher sur le problème complexe de la tarification de la pollution atmosphérique dans un avenir rapproché.
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