- La Commission de l’écofiscalité du Canada recommande d’abolir les subventions gouvernementales liées aux biocarburants
Toronto, 4 octobre 2016 — Nos politiques sur les biocarburants ont contribué à réduire les émissions de GES mais à un prix très élevé, selon un nouveau rapport de la Commission de l’écofiscalité du Canada intitulé Corriger le tir : l’heure est venue de repenser les politiques canadiennes sur les biocarburants, qui examine dans quelle mesure elles ont rempli leurs objectifs et à quel niveau d’efficience.
Ottawa et les provinces appliquent aujourd’hui deux types de politiques pour favoriser la production et l’utilisation des biocarburants : les subventions à la production, qui consistent en paiements comptant versés aux producteurs et financés par les contribuables; et les mandats pour carburants renouvelables, qui obligent à mélanger à l’essence et au diesel une certaine proportion d’éthanol et de biodiesel, deux biocarburants dont le prix plus élevé fait augmenter les coûts de déplacement des consommateurs.
De 2010 à 2015, ces politiques ont généré des réductions moyennes de 3 Mt par année, c’est-à-dire moins de 0,5 % du total des émissions canadiennes. Ces faibles réductions ont toutefois coûté très cher aux consommateurs et aux contribuables, soit environ 640 millions $ par année. Leur coût estimatif par tonne varie de 128 à 185 $, soit beaucoup plus que les réductions générées par des politiques de tarification du carbone comme celles qui sont déjà en application et qui seront mises en œuvre en 2018 dans toutes les provinces du pays, selon l’annonce faite hier par le gouvernement fédéral.
Et l’examen de leurs autres objectifs ne semble pas justifier de tels coûts. Pour ce qui est notamment du soutien aux régions rurales, même l’analyse de rentabilité d’Ottawa établit que les coûts économiques de ses mandats pour carburants renouvelables dépassent de loin leurs avantages. Quant à leurs effets sur la pollution et le développement des biocarburants de prochaine génération, ils ont été négligeables.
Par conséquent, la Commission recommande d’abolir comme prévu toutes les subventions à la production et de supprimer graduellement les mandats pour carburants renouvelables. Pour remplacer ces deux politiques, elle propose aux gouvernements du pays de poursuivre leur collaboration en vue de fixer un prix carbone pancanadien. Pendant cette transition, elle leur suggère d’établir des normes de rendement flexibles en complément de la tarification du carbone, et de financer plus largement la recherche-développement axée sur les transports à faible intensité carbonique.
« Toute politique climatique doit s’appuyer sur la tarification du carbone, qui constitue le moyen le plus efficient de réduire les émissions de GES », observe Chris Ragan, président de la Commission, professeur agrégé d’économie à l’Université McGill et membre du Conseil consultatif en matière de croissance économique du gouvernement fédéral. « Plus de 80 % des Canadiens vivent aujourd’hui dans des provinces qui appliquent ou adopteront bientôt un système de tarification, poursuit-il, et Ottawa prend maintenant le relais pour combler toute lacune. Ce nouveau contexte national nous impose de réexaminer l’efficacité de nos politiques passées. D’autant plus que nos recherches montrent que les politiques sur les biocarburants ont raté leur cible. Il est donc temps de corriger le tir en misant sur des politiques d’ores et déjà plus efficaces et plus rentables, à savoir la tarification du carbone et les normes de rendement flexibles. »
Face à l’expansion de la tarification du carbone partout au pays, « il faut aussi envisager de coordonner les politiques provinciales en un système pancanadien encore plus efficient », ajoute M. Ragan, qui conclut en ces termes : « Notre rapport montre que certaines politiques sectorielles bien intentionnées ne sont pas aussi judicieuses qu’on le croit. Mais l’application généralisée d’un prix carbone bien conçu pourrait nous assurer de réduire nos émissions tout en préservant la solidité de notre économie. »
Résumé du rapport
Les politiques sur les biocarburants soulèvent la controverse partout dans le monde. Le débat porte sur les incidences des biocarburants sur le climat, le prix des aliments, la qualité de l’air et le développement économique. À l’examen des aspects économiques et environnementaux des politiques canadiennes, le rapport Corriger le tir vise à déterminer dans quelle mesure elles ont rempli leurs objectifs. Il établit notamment qu’elles ont généré des réductions de 3 Mt par année de 2010 à 2015, mais à un prix très élevé. À l’heure où plusieurs provinces se tournent vers la tarification du carbone, il préconise enfin l’adoption de mesures complémentaires en appui au transport à faible intensité carbonique.
À propos de la Commission de l’écofiscalité du Canada
Fondée en novembre 2014, La Commission de l’écofiscalité du Canada vise à promouvoir une réforme des politiques budgétaires au profit de l’environnement et de l’économie du pays. Elle est formée d’une douzaine d’économistes chevronnés et de 18 conseillers provenant de toutes les régions canadiennes, parmi lesquels d’anciens dirigeants politiques et des leaders du secteur privé et de la société civile.
Tout au long de son mandat de six ans, la Commission publiera des rapports et suscitera des échanges sur leurs conclusions, élaborées en fonction de la diversité régionale, économique et politique du pays. Elle traitera d’enjeux clés pour la population et les décideurs, de la qualité de l’eau et de l’air en passant par les catastrophes environnementales, les émissions de GES, les transports ou la congestion routière.
La Commission a forgé le mot « écofiscalité » pour favoriser un dialogue sur des solutions innovantes axées sur des objectifs à la fois économiques et environnementaux. Elle est financée par plusieurs fondations familiales et entreprises du pays.
Pour des plus amples renseignements, visiter le www.ecofiscal.ca.
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Renseignements :
Annette Dubreuil
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